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Mon premier rendez-vous

Auteur: Jérôme Vermeulen, psychologue Présentation


Résumé: De ce suspense et cette curiosité teintée d'inquiétude si souvent présents lors des jours et des heures qui précèdent le premier rendez-vous chez un psychologue. Avec une dose de contradiction aussi, superbement exprimée par l'auteure!


Par Naty, auteure anonyme (et courageuse)


Enfin, j’ai eu le courage de lui téléphoner.

A qui me direz-vous ? A un psy !

Depuis quelques mois, j’ai des problèmes et je ne trouve personne pour en parler où plutôt, je n’ose en parler à personne. Alors en tapotant sur mon ordinateur, j’ai trouvé un numéro de téléphone d’un psychologue et je me suis dit, pourquoi pas.

Courageusement, il faut l’être je l’avoue, je lui ai téléphoné pour avoir un rendez-vous qu’il m’a donné aussitôt sans me poser de question… « lundi 17h ».

Nous étions jeudi et il me fallu attendre encore tout un week-end avant de rencontrer cet inconnu à qui j’allais déblatérer tous mes problèmes.
Durant ce week-end, je me sentais balloter entre deux sentiments.
L’un était un grand soulagement car j’allais enfin me libérer d’un poids trop lourd pour mon squelette.
Mais l’autre, qui était incontrôlable, prenait le dessus sur le premier. C’était une grande angoisse qui m’envahissait jusqu’à me laisser une boule de dix kilos sur mon estomac et qui hélas, ne voulait pas me quitter.
A cet instant, je regrettais et n’avait plus qu’une seule envie, c’était la destruction totale de mon téléphone car je me sentais encore plus mal qu’auparavant.

Lundi arrivait et je me préparais à mon premier rendez-vous.
J’avais tellement peur d’être en retard, que j’étais arrivée une heure à l’avance. De ce fait, j’avais eu le temps d’examiner de long et en large tout le quartier avant d’arriver devant sa porte.
Cette porte, qui me semblait infranchissable, possédait une sonnette dont je devais obligatoirement actionner le mécanisme pour pénétrer chez mon inconnu, ce qui est jusque-là, tout à fait normal.
Sauf que ce jour-là, n’était pas une journée ordinaire car j’allais pour la première fois rencontrer un psychologue que j’avais toujours cru être réservé pour les fous !

Je montais un escalier qui m’amena jusqu’à une salle d’attente. Et qui dit salle d’attente dit « attendre ». D’après ma montre, j’avais à peine attendu trois minutes mais mon corps, lui, ne savait pas lire l’heure ! Et ces trois minutes me paraissaient une éternité tel un étudiant attendant les résultats de ses examens. Mon cœur tambourinait aussi fort qu’un concert de hard rock, que j’avais peur que mon inconnu qui se trouvait dans la pièce d’à côté, puisse m’entendre et s’invite à mon concert.
Et que dire de mon estomac dont ma boule avait inconditionnellement grossi pour passer de 10 à 50 kg !

La porte s’ouvrit et j’aperçus celui qui allait bientôt entrouvrir les entrailles de ma mémoire.
A mon grand étonnement, il avait l’air normal. J’entends par là une personne comme tout le monde avec des bras, des jambes, une tête, un cerveau et surtout un cœur qui j’espérais, serait compréhensif.
Il me demanda de m’asseoir, ce que je fis. Il fit de même mais à ma grande surprise, il s’assit en face de moi. Etant depuis quelques mois une dévoreuse de livre de psychologie, j’avais lu qu’un psychanalyste se mettait en général derrière son psychanalysé.
Et là, il était face à moi et me fixait droit dans les yeux telle une proie qu’on ne veut pas lâcher.
Je m’enfonçais péniblement dans le fauteuil en essayant de fuir son regard insistant qui semblait me mettre à nu.

Une envie d’autodestruction m’avait envahie et je regrettais amèrement d’avoir osé, avec toute mon audace et mon courage, d’avoir pris rendez-vous avec ce bourreau d’âme.

Après un petit moment de silence, il me posa la question tant redoutée, celle qui vous cloue sur place.
« Pourquoi êtes-vous là ? »… Quelle question ! …il n’espérait quand même pas que j’allais tout lui dire. Dévoiler toute son âme à un inconnu était pour moi impossible, pourtant j’étais là pour ça.

Son regard était toujours aussi insistant et j’avais l’impression qu’il essayait de décoder mes moindres faits et gestes tel un profiler lors d’une enquête. De ce fait, je restais figer n’osant plus bouger le petit orteil pourtant caché dans mes chaussures.

J’essayais de me relâcher en me disant que puisque j’étais là, autant lui dire quelque chose même si c’était n’importe quoi. Ce que je fis, sûrement maladroitement, car mon corps tout entier ne cessait de trembler tout le long de la séance.
Cette séance arriva à son terme et bizarrement, je me sentie pas dans un meilleur état psychologique qu’à mon arrivée. Il me demanda si je voulais le revoir et on prit un nouveau rendez-vous une semaine plus tard… « lundi 17h ».

C’est à ce moment précis que je su que le courant était passé entre nous et que j’allais pendant les mois à venir lui confier mon âme. Pourtant, je me sentais toujours aussi mal, mais j’avais décidé de lui faire confiance. On se dit au revoir et en descendant l’escalier, qui aboutissait à la porte que je trouvais une heure auparavant infranchissable, je me sentie plus légère et fière de moi d’avoir pu parler de mes problèmes et surtout d’avoir trouvé une personne qui m’écoute et qui ne me juge pas. Maintenant, je dois attendre une semaine avant de le revoir.
A peine dix minutes qu’on s’est quitté et j’ai déjà hâte d’être « lundi 17h ».

Texte mis en ligne le 17-04-2011

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